Sorti en la folle année 68, Miles In The Sky marque les prémices d’une mutation qui s’apprête à transfigurer l’institution jazz – non sans en faire tiquer quelques uns… Une nouvelle impulsion impétueuse du rebelle Davis, qui ne cache plus son penchant pour les courants musicaux alternatifs, rock’n’roll en tête, qu’il souhaite désormais infiltré dans ses propres compositions. Voici donc Miles In The Sky – With Diamonds? – qui cite les Beatles, s’offre une pochette au psychédélisme explicite, et invite une guitare électrique à la fête.
Un album tout en élasticité expérimentale, en élucubrations intuitives, mais encore bifide : à la fois électrique – Stuff et Paraphernalia – et acoustique – Black Comedy et Country Son – Miles In The Sky est de l’ordre de la transition, du tâtonnement, de l’exploration des possibles. Comme son intitulé le suggère, l’oeuvre prend de la hauteur, observe et s’imprègne d’un contexte particulièrement prolifique pour encanailler – avec encore un peu de pudeur – le jazz de papa, et le sortir des griffes d’une élite à la ferveur jalouse.
C’est à George Benson que revient le rôle du profanateur – sur le fringant Paraphernalia – nimbant des riffs virtuoses de son Ibanez le nouveau pari risqué de Davis – bientôt baptisé jazz fusion. Le clou est enfoncé par Hancock et Carter, qui surenchérissent avec un joujou électrique Fender Rhodes dernier cri pour le premier, adopté sur les deux titres inauguraux de l’album, et une basse pour le second, sollicitée sur le stimulant Stuff. Galvanisé par ces nouveaux instruments, et déjà très à l’aise sur ces territoires musicaux inexplorés, le quintet s’aventure, avec un enthousiasme appliqué, dans des dimensions parfois délicieusement déconcertantes.
Masterisée à partir des bandes originales – du master analogique 1/4″ / 15 IPS vers DSD 256, vers console analogique, vers tour – et pressée chez RTI, cette édition double vinyle de collection de Miles in the Sky rejoint les onze autres créations essentielles de Davis ayant bénéficié d’un traitement sonore suprême chez Mobile Fidelity. Bénéficiant d’une production améliorée et d’un plus grand champ d’informations audibles, Miles in the Sky peut enfin concurrencer les omniprésents Nefertiti et Filles de Kilimandjaro – les albums qui précèdent et suivent, respectivement, cet opus décisif.
1. Stuff
2. Paraphernalia
3. Black Comedy
4. Country Son