1982. Alan Parsons et Eric Woolfson, têtes très pensantes du Alan Parsons Project, bidouilleurs phoniques surdoués, produisent depuis le mitan des seventies une pop chiadée et ambitieuse, souvent conceptuelle, et donc assez intellectuelle. En conséquence, pas étonnant de voir un Eye In The Sky à des années lumières d’une quelconque tendance punk/new wave binaire du moment. Non, chez The Alan Parsons Project, on est des virtuoses, messieurs dames, et ça s’entend. Duo immuable autour duquel se succéderont de nombreux intérimaires, Parsons et Woolfson jouent les seconds rôles en studio quelque temps – Abbey Road le studio quand même pour Parsons – avant d’enfin s’octroyer la vedette, sur des mélodies impeccablement produites. Un fait pas si étonnant, lorsque l’on prend en considération le fait que le fameux Parsons fut ingé son à plusieurs reprises pour « quatre garçons dans le vent » plus célèbres que le Christ, et officia également sur le cultissime Dark Side Of The Moon, équivalent aural du Saint Graal pour tout ingénieur du son qui se respecte. Il semblerait donc que nous soyons ici entre de bonnes mains.
Avec Eye In The Sky, les deux alchimistes de l’ombre vont enfin bénéficier d’une exposition et d’un succès commercial un peu plus palpable. Toujours aventureux, ces derniers ne renient en rien leur identité musicale sophistiquée, mais semblent avoir, cette fois-ci, sorti de leur tube à essai une oeuvre assez éclectique et envoutante pour faire mouche auprès de tous, oreilles profanes comprises. Un album tantôt planant, tantôt épique, aussi aérien et mélancolique que vivifiant : le déploiement gracieux d’un « sky rock » ondoyant auquel il est difficile de rester insensible. Même les armoires à glace des Chicago Bulls – et donc le sacro saint Michael Jordan, superstar et trésor national étasunien – ont investit le terrain sur l’emphatique Sirius des années durant, intronisant au passage les deux leaders du groupe barons incontestés du cool.
Mais c’est définitivement l’éponyme Eye In The Sky qui fera fondre les foules. Hymne lancinant, recherché mais accrocheur, symptomatique d’une méthode peaufinée sur les cinq albums précédents : un morceau situé à la croisée des chemins entre purisme et démocratisation d’un son si singulier. Cette édition limitée numérotée SACD, masterisée à partir des bandes originales – du master analogique mono 1/2″ / 30 IPS vers DSD 256 – retranscrit avec virtuosité le lyrisme rock de Silence and I, l’éclat de l’instrumental Mammagamma, ou l’intensité poignante d’Old and Wise. Un album comme qui dirait intemporel.
TRACKLIST
1. Sirius
2. Eye in the Sky
3. Children of the Moon
4. Gemini
5. Silence and I
6. You're Gonna Get Your Fingers Burned
7. Psychobabble
8. Mammagamma
9. Step by Step
10. Old and Wise